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ALSACE (L') SOUS LE JOUG. L'incident de Saverne


Par Émile Hinzelin


Référence : 3401
Date édition : 2015
Format : 14 X 20
ISBN : 978-2-7586-0911-7
Nombre de pages : 216
Première édition : 1914
Reliure : br.

Prix: 29.00€


     Selon Émile Hinzelin, Saverne « est la ville la plus calme que nous connaissions ». Cette parfaite image de la paix humaine se souleva pourtant en 1913, lorsqu'elle sut qu'un lieutenant du 99e régiment d'infanterie en garnison dans la cité, le baron von Fortsner, traitait les Alsaciens de « voyous ». Une foule aux clameurs ironiques assiégea d'abord la maison de l'officier puis la caserne elle-même. Les mitrailleuses furent braquées sur le groupe qui haussa les épaules. Aucun pavé ne fut déplacé, aucun réverbère ne fut abattu ; seules les vitres de la chambre du lieutenant furent cassées. L'Alsace toute entière protesta spontanément contre ces injures et rit dédaigneusement de ceux qui prétendaient établir un ordre nouveau en faisant preuve de brutalité et d'iniquité. Les Allemands avaient écrasé les troupes d'Alsace-Lorraine, faisant de telle petite ville, qui naguère n'était qu'un point sur la carte stratégique, un camp retranché. Le budget de la guerre en Allemagne contenait une longue série de chapitres sur des travaux à effectuer dans les diverses garnisons de la région. Entre 1900 et 1913, plus de vingt-deux mille Alsaciens-Lorrains faisant partie de la génération instruite par les Allemands acquirent volontairement la qualité de Français et le nombre d'engagés dans la légion étrangère fut en constante croissance. Les Allemands tentèrent pourtant tout pour les retenir. Dans un premier temps, ils accablèrent d'amendes les familles des déserteurs, puis, changeant de méthode, ils fermèrent les yeux devant les conscrits défilant sous les couleurs alsaciennes. Après tant d'années d'invasion, le gouvernement allemand se sentait toujours en pays étranger. Tout l'inquiétait : une chanson, un mot, un geste, un chiffon. En décembre 1912, la police allemande défendit à ses agents de porter la pèlerine ; ce vêtement était de coupe française et considéré comme séditieux. On l'appelait le Revanchemantel, le manteau de la revanche. Certains durent payer une amende ou furent condamnés à la prison parce qu'ils avaient parlé français. Une guerre aux enseignes, aux étiquettes et aux écriteaux fut ouverte : le coiffeur s'appela officiellement le Friseur, la modiste devint la Modistin et la pharmacie, la Pharmazie. Le bleu, le blanc et le rouge ne pouvaient plus s'afficher ensemble. Après avoir déclaré la guerre aux menus en langue française, c'est avec la gastronomie que les Allemands cherchèrent à rivaliser, fiers de clôturer un somptueux dîner de gala, par une glace à la chinoise frite dans de la graisse de porc.
© Micberth
     

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